Sommeil et médecine générale

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Narcolepsie-cataplexie

Foudroyé par l’émotion : le coup de foudre...

mardi 22 août 2006, par guilhem

Dans la classification des troubles du sommeil, la narcolepsie-cataplexie appartient aux troubles "endogènes" : ici, le sommeil est dégradé à cause d’une maladie neurologique qui perturbe le sommeil "de l’intérieur".

L’enregistrement polysomnographique nocturne et diurne (au cours de siestes), est nécessaire à la confirmation du diagnostic mais l’essentiel se fait à l’interrogatoire.

On distingue quatre types de pathologies intrinsèques au sommeil et associées à une somnolence excessive :

    Les signes cliniques de la Narcolepsie-cataplexie :


    - Somnolence Diurne Excessive
    - Fatigue et manque d’allant permanent
    - Attaques imprévisibles de sommeil
    - Cataplexies (perte du contrôle des muscles volontaires) provoquées par des émotions (avec ou sans chute).
    - Paralysies, juste avant ou juste après le sommeil
    - Hallucinations et rêves réalistes et terrorisants
    - Sommeil de nuit fragmenté par des éveils, des cauchemars...

    La maladie de « Gélineau » ou narcolepsie-cataplexie est une maladie rare mais probablement largement sous-diagnostiquée. On estime sa prévalence entre 0,02 à 0,05% de la population (soit un peu plus que la sclérose en plaques, par exemple), ce qui représente entre 25 000 et 35 000 malades en France où de nombreuses formes incomplètes passent longtemps inaperçues.

    C’est une maladie de la vigilance et du sommeil. Le sujet souffre en premier chef d’endormissements incontrôlables.

    Depuis 1957 la narcolepsie-cataplexie bénéficie d’une reconnaissance scientifique bien complète mais elle reste relativement méconnue du grand public.
    On la définit par l’association de quatre symptômes clinique (la "tétrade narcoleptique") et le diagnostic est confirmé sur des critères somnologiques (enregistrement du sommeil) et immunologiques (car il s’agit aussi d’une maladie auto-immune et génétique).

    Ces quatre signes d’appel cliniques sont présent de manière variable selon les cas et le degré de gravité de la maladie : Somnolence ; Cataplexie ; Hallucinations ; Paralysies.

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      Accès de sommeil ...

      La somnolence est caractérisée par des accès de sommeil plus ou moins rapprochés entrecoupés de périodes de bonne vigilance. .

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      Pouvoir dormir n’importe où...


      Une hygiène rigoureuse des horaires de sommeil et la pratique régulière de siestes bien programmées permet de réduire la consommation de médicaments éveillants.
      Souvent, le malade apprend plus ou moins spontanément à reconnaître et à gérer son besoin de sommeil par des siestes qui restaurent un niveau de vigilance relativement acceptable.

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      Ne pas confondre cataplexie et malaise cardiaque...

      La cataplexie se définit par l’apparition de chutes brutales par relâchement musculaire (conforme à l’atonie musculaire rencontrée dans le sommeil paradoxal), souvent à l’occasion d’une émotion (cela va de la colère à la surprise en passant par le coup de foudre amoureux...).

      Ce relâchement brutal du tonus musculaire peut n’intéresser que quelques muscles du visage (parole bloquée) ou entraîner une chute (parfois avec blessure).
      les malades adoptent spontanément quelques « trucs » pour prévenir leurs chutes (par exemple, ils disent essayer de contracter volontairement tous leurs muscles dès qu’ils ressentent les prémisses de la crise).

      Il est important de noter que durant l’attaque de cataplexie, la personne qui a chuté reste parfaitement consciente de ce qui lui arrive mais la paralysie l’empêche de le manifester. Ce détail est un signe important pour le diagnostic différentiel avec les crises d’épilepsie (qui sont suivies d’une amnésie "post-critique").

      Les autres signes cliniques de la narcolepsie ne sont pas obligatoirement présents mais ils font partie du tableau et leur découverte fortuite lors d’un interrogatoire médical devrait conduire à une exploration plus complète du sommeil.
      Voir l’article :"Examens complémentaires".

    • Il s’agit d’hallucinations du sommeil (qui surviennent dès l’endormissement ou au cours de la nuit), que le sujet interprète souvent comme des rêves, mais dont le contenu très réaliste et souvent terrifiant est parfois à l’origine d’une véritable hantise du coucher.
      Voir l’article :"hallucinations et paralysie au cours du sommeil".
      Ces phénomènes ont longtemps conduit les humains à s’interroger en vain sur le sens des "messages" qu’ils contiennent.
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      "Narco" 2004 ( Tristan Aurouet, Gilles Lellouche)


      Dans le cas des parasomnies liées à la maladie de Gélineau, il est évident que toute interprétation psychanalytique de la maladie ne relève que de la fiction cinématographique comme dans le film Français "Narco".
      "Narco" (qui raconte l’histoire d’un malade qui exploite ses visions pour en faire des thèmes de bandes dessinées), montre avec humour, une intéressante description des "évanouissements" inopportuns et des hallucinations qui y sont associées ainsi que des problèmes de somnolence que rencontrent les malades dans leur vie quotidienne.

    • Les paralysies du sommeil sont souvent associées aux hallucinations et en renforcent l’aspect terrifiant. Le sujet qui reste lucide n’arrive plus à bouger spontanément ni à respirer avec une amplitude normale. Cette sensation qui dure parfois plusieurs minutes est décrite comme particulièrement angoissante ; elle est parfois confondue avec une attaque de panique (type « spasmophilie ») car le sujet a parfois l’impression qu’il pourraît en mourir).
      Voir l’article :"Spasmophilie, Attaque de panique"

    NB : Hallucinations et paralysies du sommeil (Cf.), peuvent survenir isolément chez certains dormeurs qui ne sont pas atteints de narcolepsie-cataplexie.
    Le diagnostic formel (notamment pour les formes frustes ou atypiques) repose sur l’enregistrement polygraphique du sommeil nocturne et des siestes. Outre l’objectivation d’une SDE (Somnolence Diurne Excessive) (délais d’endormissement raccourcis lors des 5 tests de sieste itérative : TILEs), on y voit une anomalie caractéristique de l’architecture du sommeil avec passage en sommeil paradoxal dès l’endormissement (délais de SP inférieurs à 15mn au moins 2 fois sur 5).
    Voir l’article :"Exploration complémentaire du sommeil".

    La découverte quasi fortuite, par l’équipe des immunologistes de Montpellier en 1985, d’un marqueur génétique spécifique de la maladie, (présence d’un typage HLA DR2-DQ1) a fait faire un bond en avant à la recherche mondiale sur le sommeil.
    Pour la première fois, une maladie du sommeil se présentait avec un marqueur génétique au même titre que la sclérose en plaques ou le diabète.
    Cette transmission génétique était connue dès la première tentative d’individualisation de la maladie (Westphal en 1877) par les études de généalogie mais on ne connaissait pas encore les gènes impliqués.

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    Médor dort ...

    On peut ajouter qu’existent des modèle animaux de la maladie chez certaines races de chiens et certains taureaux. Les modèles canins (plus faciles à étudier que le taureau, dit le Pr Mignot avec humour) présentent les mêmes symptômes que les humains et permettent de tester l’effet des médicaments destinés aux malades humains.

    Télécharger ici un petit film tourné à Stanford par le Professeur Emmanuel Mignot sur des chiens narcoleptiques, chez qui un sentiment de joie intense provoque une cataplexie.

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    "Poupée de chiffon"

    La « joie intense » provoquée par les caresses sur ce petit chien déclenche une abolition momentanée du tonus musculaire avec une chute et la posture en "poupée de chiffon" (803 ko).


    Le traitement de la "maladie de Gélineau" repose d’abord sur l’élimination des cofacteurs aggravant la maladie (notamment une organisation de la journée qui prévoit de pouvoir faire environ 1/4 d’heure de sieste toutes les 2 heures).
    Les malades peuvent s’aider de substances éveillantes (caféine et modiafinil ou amphétamines).

    On connaît mal le traitement des attaques de cataplexie. Il semble y avoir des résultats avec les molécules qui diminuent le sommeil paradoxal comme certains anti-dépresseurs (anafranil° à faible dose ? [1]).
    Certaines molécules sont en cours d’essais comme le Gamma-OH et semblent donner des résultats intéressants.

    Voir l’interview du Pr Mignot (Novembre 2001 pour l’organisation EuropUSA°) :
    "Après 10 ans de recherche, j’ai trouvé en 1999 le gène de l’hypocrétine impliqué dans la narcolepsie. Cette découverte est un espoir incroyable pour les patients. En théorie, on pourrait remplacer l’hypocrétine pour soigner les malades de narcolepsie comme c’est le cas pour les diabètes en leur injectant de l’insuline. En pratique, c’est plus compliqué car on doit l’injecter dans le cerveau. On va trouver les traitements dans quelques années, ce n’est qu’une question de temps et de travail. Ce traitement s’appliquera aux narcoleptiques mais peut-être aussi pour aider les personnes qui ont des problèmes de sommeil de manière générale".

    NB : L’hypocrétine porte également le nom d’orexine depuis que l’on sait que les deux molécules ne font qu’une. Cette découverte récente permet de situer les problèmes de sommeil au centre de l’équilibre alimentaire.


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    Quelques liens externes pour en savoir plus...

    [1Un autre antidépresseur, la Fluoxétine, a fait récemment la preuve de son efficacité pour diminuer le nombre d’accès cataplectiques.